N°7. Elles étaient là

Ce numéro est né d’une idée de Marie, l’une de nos relectrices. J’ai longtemps hésité avant de l’écrire. Parler des femmes invisibilisées dans l’histoire de l’art quand on est un homme, c’est forcément marcher sur un terrain fragile. Mais c’est peut-être aussi pour cela qu’il fallait le faire, parce que regarder suppose d’admettre d’où l’on regarde.
Il ne s’agissait pas ici de parler à la place de, ni de corriger l’histoire, mais de comprendre les mécanismes de l’effacement : comment certaines œuvres disparaissent des récits, comment le regard dominant choisit ce qu’il montre et ce qu’il oublie. Chaque article explore un fragment de cette mécanique : la place des femmes du Bauhaus, le corps d’Artemisia Gentileschi dans la peinture baroque, les pionnières du numérique, ou encore Vivian Maier, dont l’œuvre interroge la nécessité même d’un spectateur.
Ce numéro n’est pas un hommage, encore moins une réparation.
C’est une tentative pour observer autrement. Voir comment l’art, le design, la photographie ont longtemps construit des hiérarchies entre les genres, et comment certaines femmes les ont déplacées de l’intérieur.
Je ne crois pas qu’un magazine puisse corriger l’histoire, mais il peut ouvrir à d’autres voies le regard de ceux qui le lisent, laisser la place à d’autres récits, d’autres points de vue, d’autres manières de dire « je vois ».
Alors ce numéro avance avec humilité, conscient de ses angles morts, mais attentif à tout ce qui doit enfin apparaître à la lumière, parce que trop longtemps resté dans l’ombre.
Ce numéro n’a rien d’exhaustif. Il ne parle pas des centaines de femmes qui ont bouleversé le monde. En ne parlant que de certaines, il en invisibilise d’autres, malgré lui. C’est un choix que nous avons dû faire, en espérant qu’il ouvre plus de portes qu’il n’en ferme.